Meta gagne en justice : acquisitions d’Instagram et WhatsApp jugées légales

Un juge fédéral a statué en faveur de Meta Platforms en décidant que les rachats d’Instagram et de WhatsApp ne violaient pas les lois antitrust et n’ont pas constitué un monopole illégal dans les services sociaux. La décision, rendue par le juge James E. Boasberg du tribunal de district des Etats-Unis pour le district de Columbia, constitue une défaite importante pour la Federal Trade Commission (FTC) et restreint les voies judiciaires visant les pratiques des grandes plateformes technologiques.

Les éléments clés de la décision

• Le juge Boasberg a publié une décision de 89 pages concluant que les acquisitions d’Instagram (2012, 1 milliard de dollars) et de WhatsApp (2014, 19 milliards de dollars) n’ont pas porté atteinte à la concurrence dans un marché numérique en pleine évolution.
• La cour a estimé que le gouvernement n’a pas démontré que Meta contrôlait un monopole sur un marché étroitement défini de « personal social-networking services ». Le secteur s’est élargi avec l’essor d’acteurs comme TikTok et YouTube.
• La FTC soutenait que Meta avait adopté une stratégie de rachat dite « buy or bury » pour acheter des concurrents et étouffer l’innovation, en s’appuyant sur plus de 400 documents internes. Le gouvernement invoquait la Section 2 du Sherman Antitrust Act contre les pratiques de monopolisation.
• Le juge a rejeté cet argument en soulignant l’évolution rapide des marchés technologiques et la concurrence persistante et diverse que rencontre désormais Meta, notamment via la transformation vers des flux algorithmiques de courtes videos concurrents de TikTok et YouTube.

Déroulé du procès et témoignages

Le procès a duré six semaines. Près de 40 témoins ont été entendus, dont le PDG de Meta, Mark Zuckerberg. Les témoins ont été interrogés sur la stratégie concurrentielle, l’évolution des produits et les trajectoires possibles d’Instagram et de WhatsApp s’ils étaient restés indépendants. Des dirigeants de LinkedIn, Reddit, Pinterest et YouTube ont fourni des points de vue variés sur la définition du marché des réseaux sociaux, compliquant la tentative de la FTC de circonscrire étroitement l’environnement concurrentiel de Meta.

Conséquences et réactions

Du côté de Meta, l’équipe juridique a mis en avant les investissements faits pour développer Instagram et WhatsApp, présentant ces acquisitions comme des moteurs d’innovation et de valeur économique. La société a souligné que ses services restent largement accessibles et qu’ils apportent des fonctionnalités utiles aux utilisateurs.

Pour la FTC, la décision est un revers dans la stratégie plus large visant à limiter l’influence des grandes entreprises technologiques par la voie judiciaire. Bien que le ministère de la Justice ait obtenu des victoires dans deux affaires antitrust contre Google portant sur la recherche et la publicité, d’autres poursuites fédérales visent Amazon et Apple. La décision contre Meta complique la stratégie du gouvernement, d’autant que la cour a retenu une définition large du marché des réseaux sociaux et s’est appuyée sur l’existence d’une concurrence dynamique.

Des experts juridiques notent que cette approche rendra un appel de la FTC plus difficile, compte tenu des standards établis pour la définition du marché et de la déférence que les juridictions d’appel accordent généralement aux constatations des tribunaux de première instance.

Contexte procédural

La décision clôt des années de litige engagées fin 2020 sous l’administration Trump et poursuivies avec le soutien des administrations Biden et de la suite de l’administration Trump. Le juge Boasberg avait déjà rejeté des versions antérieures de la plainte pour manque de précision sur la définition du marché et la conduite anticoncurrentielle, mais avait autorisé une version révisée à aller à l’instruction.

Enjeux futurs

• Meta se trouve libre de poursuivre des initiatives ambitieuses, notamment des investissements importants dans l’intelligence artificielle, un secteur où la concurrence reste fluide.
• Pour les régulateurs américains, la décision suggère qu’il faudra adapter les stratégies d’action contre les grandes plateformes à des marchés difficiles a priori a encapsuler dans des définitions juridiques strictes.

La décision du juge Boasberg marque une étape importante dans la confrontation entre régulation antitrust et évolutions rapides du secteur technologique.